© OKRA landscape architects, Antoine Thevenet

Les villes vertes de demain

Face à l’urgence climatique et à l’augmentation de la population mondiale qui vivra en grande partie en zones urbaines, les villes doivent se réinventer pour permettre à l’homme et à la nature de développer une nouvelle interaction. Les défis qui se posent actuellement découlent d’un déséquilibre dans nos relations avec la nature qui dure depuis un certain temps. La publication de “Notre avenir à tous” a mis en exergue la nécessité d’une démarche tournée vers l’avenir et de repenser nos actions, afin de ne pas compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs besoins. Quelques décennies plus tard, force est de constater que nous n’avons pas su agir de manière appropriée, avec pour conséquence la multiplication des rapports faisant état d’inondations, de sécheresses et d’une forte diminution de la biodiversité.

Pour réinventer nos villes, nous misons sur la création de “villes saines”. Des villes résilientes, dynamiques, dotées d’une vie urbaine riche et inclusive, d’un système de mobilité équilibré, d’une bonne cohésion sociale et d’une relation étroite avec la nature. Pour cela, il faut organiser différemment le réseau urbain, en l’ancrant dans le paysage dans le contexte de la transformation progressive du paysage en cours d’urbanisation. Dans le même temps, nos projets doivent refléter la magie, l’humanité et l’histoire des lieux, afin que les habitants puissent en faire l’expérience et en profiter. Nous participons ainsi à la création de liens et de relations qui constituent le terreau des villes et des communautés de demain.

Un cadre de vie résilient et adapté au climat

Il faut une pensée holistique. Pour créer des villes saines et attrayantes pour les habitants, il faut approcher le défi climatique dans sa globalité, en y intégrant l’évolution vers une économie circulaire et une mobilité repensée. Nous greffons les stratégies intégratives et les problématiques liées à l’eau sur un”design fondé sur la nature” afin de prévenir les inondations et les effets néfastes de la sécheresse. Nous absorbons les pics d’eau de pluie, que nous stockons temporairement, et nous couplons ces solutions à un aménagement spatial de qualité dans l’espace public. 

Il est essentiel de créer une base spatiale solide avec des ‘réseaux bleu-vert’, soutenus par des combinaisons intelligentes, afin d’ajouter de nouvelles qualités au cadre de vie urbain. Les toitures végétalisées peuvent être associées avec un système de stockage temporaire des eaux de pluie. Des espaces verts généreux dans les rues et des îlots végétalisés contribuent à la rétention temporaire des eaux de pluie. Des plantations fournies, bien irriguées, réduisent le stress thermique en environnement urbain grâce à l’ombre et à l’évaporation.

Pour définir la qualité de l’aménagement spatial d’un espace public adapté au climat, nous utilisons une boîte à outils “eau” et une boîte à outils “stress thermique”. La stratégie utilisée pour l’eau et les espaces verts du projet ‘Meridian Water’ à Londres montre comment le développement d’une zone importante de friche industrielle peut faire de l’eau un élément essentiel de l’identité de la zone. Il prévient les inondations grâce à la collecte des eaux de pluie, à leur stockage temporaire et à leur traitement.

Dans les villes historiques aussi, il est possible d’aborder différemment la végétation et l’eau. Pour le canal d’Utrecht, la stratégie d’adaptation au climat prévoit un cadre de structures vertes avec des passages et des zones de rafraîchissement, s’appuyant sur les structures et le patrimoine existants, comme le canal, les quais et les parvis. La restauration du canal Catharijnesingel est la dernière pièce d’une opération à grande échelle. Ce projet démontre qu’il est possible de transformer l’infrastructure lourde de la ville pour y inclure un parc et de l’eau, et de réorganiser la mobilité au profit des piétons et des cyclistes. Le succès du réaménagement du canal illustre qu’il existe des façons d’optimiser l’architecture présente pour créer un climat confortable au cœur de la ville, ouvrant la voie à une végétalisation plus poussée du centre-ville. Une nouvelle couche a été ajoutée au parc historique de Zocher. La transformation se poursuit dans le parc Moreelse, situé non loin, qui sera transformé en un ensemble de jardins dans le cadre d’un projet ultérieur.

OKRA landscape architects pleit voor groene steden
© OKRA landscape architects, Antoine Thevenet

Biodiversité et biotopes urbains

L’évolution vers des villes saines exige plus que la transformation d’espaces pavés durs en espaces verts doux. Nous façonnons la nouvelle symbiose qui définit la relation actuelle entre les citadins et la nature par le biais de “biotopes urbains”, offrant une plus grande variété de plantes et une plus grande biodiversité. L’importance des espaces verts urbains prend tout son sens lorsque leur valeur écologique est correctement liée à leur utilisation quotidienne dans un environnement urbain. Le biotope urbain repose sur l’idée de développer les plantations selon les principes de succession naturelle de la végétation. Il s’oppose à l’uniformisation des plantations dans les villes, qui a entraîné ces dernières années une mortalité massive due à la graphiose de l’orme, au chancre du châtaignier et à la chalarose du frêne. 

Les “biotopes urbains” s’inspirent du biotope du paysage environnant. Les principes de la permaculture peuvent servir de base à la composition d’un biotope urbain. Il s’aménage comme un système forestier, avec sept couches de plantations. La conception des biotopes combine la méthode de réhabilitation de la végétation naturelle, telle qu’elle est utilisée dans la “micro- forêt”, avec la forêt nourricière (“agroforêt”). Les arbres principaux définissent l’atmosphère, à l’instar de l'”arbre-mère” dans la forêt. 

© OKRA landscape architects, Antoine Thevenet

Ce qui fait la force des communautés écologiques naturelles, c’est la synergie et renforcement mutuel entre les espèces et la symbiose qui régit la succession, faisant grimper la valeur biotope. Le biotope urbain, qui se compose d’éléments naturels et artificiels, constitue également un habitat pour les animaux de villes, en tenant compte de leurs exigences en matière d’habitat et des interactions écologiques de ces espèces. En s’appuyant sur les principes de l’écologie urbaine dans une zone plus large englobant les quartiers environnants, on dresse un “top 5” des espèces animales typiques de la zone.

En ville, le climat est inhospitalier et le sol subit de nombreuses perturbations. Mais même dans ces conditions très différentes de la nature, il est possible de donner une nouvelle dimension à la végétation urbaine. Le modèle de plantation est une composition façonnée par l’homme mais inspirée par le lieu où il se trouve. Le “biotope urbain” qui longe la zone du canal de la Merwede à Utrecht a été baptisé “biotope de Merwede”. Sur la côte, près de Cadzand, nous avons le Biotope des dunes et dans le quartier de l’aéroport de Bruxelles, nous parlons du Biotope de l’aéroport.


Texte : Martin Knuijt, OKRA landscape architects
Photos : Utrecht Archive, + noms des photographes selon l’utilisation ! Voir plus bas.

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